M. LOUIS MALVY

	M. Malvy vient d'être réélu député du Lot en tête de la liste du Cartel des Gauches après
une campagne des plus vives. Demandez à l'abbé Magne.
	Ancien attaché au Cabinet de M. Camille Pelletan, M. Louis Malvy fut à peine député qu'il
devenait le 3 mars 1911 sous-secrétaire d'État à l'intérieur, à la suite d'une interpellation
retentissante sur l'application de la loi de séparation par M. Aristide Briand, qui provoqua la
chute du Ministère. Comme rapporteur de la question, l'interpellateur s'était puissamment
documenté et il fut plaisant de voir que le ministre avait atténué par des circulaires la rigueur
de la loi, ce qui est assez courant. La majorité de la Chambre ne admit point et l'interpellateur
triomphant fut appelé à un demi-portefeuille par M. Monis.
	Sous le gouvernement de M. Caillaux en 1911, M. Malvy resta place Beanvaeu. Le 9 décembre
1913, M. Doumergue lui confia le minitère du Commerce.
	M. Viviani, le 13 juin 1914, l'appelait à l'Intérieur, il conserva ce portefeuille sous
les gouvernements successifs jusqu'en 1917.
	M. Louis Malvy vient de sortir d'un cauchemar effroyable, cauchemar qui eut pour origine
l'accusation de M. Clémenceau à la tribune du sénat, et eut son dénouement devant la Haute Cour
de la Justice.
	M. Clémenceau, qui avait organisé l'aftaire Dreyfus, semble ne pas avoir été cette fois
du côté de la Justice et de la Vérité.
	M. Poincaré lui-même, qui a le talent de libérer sa conscience un peu tard, peut-être,
mais de la libérer tout de même, apportait le 18 novembre à la tribune du Sénat une déclaration
sensationnelle:
	-"Les poursuites se sont faites en dehors du Président de la République. Il n'a jamais été
à ma connaissance que M. Malvy ait trahi son pays."
	Il n'en fallut pas plus pour que la majorité républicaine du Sénat revînt sur une erreur
et amnistiât l'ancien Ministre de l'Intérieur.
	Beaucoup de membres de la Presse n'ont pas perdu le souvenir de la minute émouvante où,
dans son cabinet, le ministre de l'Intérieur Malvy, pâle, tremblant et pleurant, confirma la
déclaration de guerre, en août 1914.
	Pas un de ceux qui ont assisté à cette scène n'a jamais douté de son patriotisme.
	Désormais on court à la révision et il ne restera qu'une erreur politico-judiciaire
de plus.
	Voilà ce que c'est  que de ne pas respecter le principe de la séparation des pouvoirs.
	Dans son département d'origine et à Souillac, où il jouit d'une grande estime, au comité
exécutif du Parti radical-socialiste qui ne l'a jamais renié, on tuait hier le veau gras pour
fêter le retour de l'innocent.
	Cette réparation morale est bien due au député du Lot. Elle le consolera des amertumes
imméritées, qu'une vengeance politique praraît insuffisante à justifier.